cellule 78 tours pm

La rencontre s'est produite comme seul le hasard sait le faire. J'étais sur le marché aux puces hebdomadaire de la FEYSSINE, à VILLEURBANNE, en train de trier une pile de 78 tours, comme un chien rognant son os. Un Monsieur me pose la question de savoir avec quelle cellule je lis mes 78 tours. Je lui repondis (sur un ton un peu agacé) que je les lisais avec une SHURE M78, faute d'avoir les moyens de me payer des cellules CLEMENT. A quoi Monsieur me répondit :
"Justement, je fabrique des cellules modernes reposant sur le même principe que les cellules CLEMENT, la réluctance variable". Assez incrédule dans un premier temps j'ai vite compris après discussion que le bonhomme Paul était sérieux!
Un rendez-vous fut rapidement pris et après avoir déjeuné copieusement avec Paul et mon ami Gilbert dans un restaurant des Dombes, d'un peu diététique menu (grenouilles, poulet à la crême, fromage blanc, dessert - ce menu étant cher à Gilbert pour des raisons personnelles), nous nous sommes rendus chez Paul pour découvrir son intallation.
La salle est très grande, tapissée d'étagères supportant des dizaines de milliers de disques (majoritairement des 78 tours) Une paire de caissons de graves ALTEC VOT A7 équipés d 'ALTEC 416A, surmontés de pavillons 15 cellules Philips de fabrication maison, trônent en bonne place. Les pavillons sont dotés de chambres de compression JBL 2441 (2"), les tweeters sont des ALTEC 902 8T fixés sur des pavillons en bois également de fabrication maison. Le filtre est un modèle trois voies, portant sur le schéma d'origine mais avec des composants audiophiles. Les amplis sont de fabrication artisanale et provoquent l'inquiétude: ce sont des PSE de 805 drivés par des 807, alimentés par des racks couverts de transfos et de condensateurs à bain d'huile aux bornes non protégées. On suppose vite que tout contact avec ces racks est létal, le kilovolt étant là, prêt à sévir...

Cette pièce est aussi un petit musée de la radioffusion. On y trouve plusieurs platines et magnétos de studio , ainsi que des curiosités (une Ondioline par exemple). La lecture se fait principalement par une platine TECHNICS SP10 MKII "Broadcast ". L'alimentation est séparée et permet trois vitesses réglables électroniquement. Le préampli est constitué par la partie phono RIAA d'un intégré HARMAN KARDON. Le bras de lecture est aussi une réalisation maison. On repère tout de suite la cellule PM, rouge vif. Cette cellule a été développée par Paul durant deux ans par un travail quotidien.
Paul a découvert les 78 tours il y a très longtemps après en avoir acheté une pile pour trois fois rien dans une salle des ventes. Il essaye avec les moyens du bord dans un premier temps d'écouter ces galette, y prend goût, puis au fil des ans il atteint le sommet avec les platines et les têtes de lecture Pierre CLEMENT utilisées par l'ORTF jusqu'à l'apparition du microsillon. Si ces têtes sont réputées elles souffrent cependant de plusieurs défauts: elles sont lourdes, viellissent mal, et exigent l'utilisation de bras CLEMENT par leur fixation, leur connecteur et leur orientation.
De plus les pointes de lectures deviennent rares. Paul décide donc de démonter une cellule CLEMENT pour comprendre le fonctionnement. Le principe est simple: une bobine baigne dans un champ magnétique, un élément magnétique perturbateur relié à un cantilever vertical actionné par la tête de lecture provoque un signal aux bornes de la bobine. Le signal est très puissant, de l'ordre une vingtaine de milivolts. Il fabrique donc plusieurs prototypes. Le premier ressemble beaucoup à la structure CLEMENT mais "pèse un âne mort". Il faut alléger l'ensemble pour l'utiliser sur des bras modernes. D'où une succession d'essais pour arriver à un poids convenable. Les aimants modernes, puissants et légers, participent fortement à cette réduction de poids.

Un autre problème est à régler: le signal de sortie du prototype est trop fort et sature les préamplis prévus pour les cellules à aimant mobile. Pour utiliser la cellule sur une entrée RIAA sans saturation sur les" forte" il faut baisser le signal. Cette adaptation oblige Paul à modifier le nombre de spires et le diamètre du fil pour arriver à un niveau de sortie compatible. L'autre inquiétude est la pérénité de la cellule. Les cellules CLEMENT arrivent en fin de vie par le viellissement des pièces en caoutchouc assurant la suspension. La réparation est possible mais délicate. Il est décidé de ne plus utiliser d'élastomère. Paul remodifie encore sa cellule et imagine une suspension par ressort métallique. Une fois encore c'est par essais successifs que le problème est réglé. Toutes ces modifications font qu'aujourd'hui que la cellule de Paul est très différente de la cellule fabriquée par Pierre CLEMENT. Le cantilever vertical est conservé, ainsi que le système de fixation des pointes de lecture, identiques. La présence du ressort amène à la cellule une rapidité de suivi du sillon supérieure à celle du caoutchouc. L'écoute est rapide, superbe... Un essai sur mon installation a été fabuleux. Le bruit est inexistant sur disque neuf, la dynamique est énorme. Exit la SHURE M78! De plus les rayures ne provoquent plus de "clocs" bruyants. Paul aime d'ailleurs faire écouter un disque fêlé! On peut aussi, avec cette cellule écouter de nouveau des disques illisibles avec les cellules classiques. On peut de ce fait redécouvrir certains disques rangés dans la pile des condamnés!

Cette cellule sera bientôt commercialisée avec deux types de pointes de lecture en diamant: une dédiée aux 78 tours l'autre aux microsillons mono (78 ou 33TMN) La force d'appui requise est de 6 grammes pour les 78 tours, et de 4 grammes pour les microsillons. Son poids est de 8g (contre 36 pour une CLEMENT!) ce qui permet de l'installer sur tous les bras modernes . Toutes les pièces intérieures de la cellule sont fabriquées par Paul. Le socle et le capot sont fabriqués par un industriel par impression 3D. Les pointes de lecture sont produites par un diamantaire, elle sont rigoureusement identiques à celles utilisées sur les cellules CLEMENT et peuvent être montées en lieu et place. Les deux versions de pointes pourront être vendues à part.

CORRECTION : Les 78 tours ont été enregistés suivant des corrections propres aux labels. Cependant les 78 tours pressés dans les années 50/60 peuvent être lus suivant la correction RIAA des vinyles sans problèmes majeurs. Un correcteur réglable comme le Monophono est préférable pour les diques anciens et amène un petit plus. La résistance de charge de cette cellule a été estimée autour de 47 kiloohms avec une boite de substitution. Aucune capacité en parallèle n'est nécessaire. Le niveau de sortie est de 4mV, compatible avec les enrées RIAA.

ECOUTE : L'écoute de 78 tours avec cette cellule désoriente dans un premier temps. Les microdétails affluent, le bruit est absent, la sonorité et la forte dynamique portent la signature de la réluctance variable. Les voix sont superbes et malgré la bande passante tronquée aux deux extrémités (défaut endémique des 78 tours) et une écoute en mono on oublie vite que l'on écoute un 78 tours, jusqu'a la fin du disque deux minutes et demie plus tard!
Les personnes à qui on fait découvrir l'écoute des 78 tours sont très surprises. Elles avaient le souvenir du son nasillard des gramophones.

LES BRAS DE LECTURE PM

Paul fabrique aussi des bras de lecture de sa conception .Le bras est suspendu à un fil. Le frottement latéral est minimisé par la seule rotation de l'axe vertical dans une bague TEFLON. La suspension est effectuée par un fil qui assure aussi un antiskating naturel par sa torsion. Plusieurs longueurs et finitions sont disponibles à la demande.

Paul nous a acceuilli plusieurs fois avec plaisir. La visite de son installation et de son atelier est toujours un bonheur. Qu'il en soit ici remercié.

Pour toutes informations : paulmaudio@gmail.com

Le monophono de Paul

Ce Monophono avec une alimentation séparée a été fabriqué pour Paul. On ne peut plus simple..